L’année 2020 représentera certainement un tournant pour ce blog de rap, comme un tournant pour l’humanité. Va-t-elle prendre conscience qu’offrir du dioxyde de carbone à notre atmosphère est inutile pour se faire apprécier par elle ? Vais-je comprendre que fournir du rap commercial aux internautes est inutile pour se faire apprécier par eux ?…
Oui, 2020, c’est une date que je n’arrive pas à réaliser tant elle me fait penser aux nombreux films de science fiction que j’ai pu avalé plus jeune, se situant dans un lointain avenir pour l’époque, genre 2027.
Mais cette fois-ci on y est presque dans le tur-fu les petits amis, et pour moi comme pour vous fan de Hip-hop et de MP3 estampillés allorap.com, cela va être certainement une année importante. Mais pour le comprendre, revenons à la genèse de tout ce bordel.
Nous somme en janvier 2009, on se les gèle grave à Paris, où je fait mes premiers pas dans le domaine de la programmation informatique pour un stage en entreprise, lors d’une reconversion professionnelle (j’étais intérimaire en usine jusque là car après le bac je ne savais pas quoi faire).
Je comprends à l’issu de celui-ci que je ne suis pas fait pour prendre à longueur de journée des ordres d’un patron même pour un travail intellectuel bien payé, et je me dis mon ami, va falloir que tu crées ta boîte un jour où l’autre…
Et pourquoi pas ma vieille idée de site de rap, un rêve qui avait pris racine en moi 10 ans plus tôt, durant mes études à l’IUT de Verdun, à cause d’un projet personnel à développer. Oui car fan de rap depuis l’âge de douze ans, la prof de multimédia nous offrait la possibilité de faire un site internet sur le sujet de notre choix. Je choisis de faire une carte intéractive du rap parisien…
Seulement entre ce virus chopé à l’université et l’acquisition du nom de domaine allorap, il se passe 12 ans durant lesquels je réfléchis tranquillement dans mon temps libre à un concept, aidé parfois dans mes réflexions par mon ami rasta, Fabrice, a.k.a Ras Fab, qui, il faut bien l’avouer, avait du mal à comprendre mes élucubrations sur l’avenir de la nouvelle économie numérique, à une époque où les blogs n’existaient pas vraiment et Facebook n’était encore pas trop populaire en France.
Non, moi, le site de référence qui m’avait foutu une claque de l’espace vers la fin des années 90, c’était le site anglophone allmusic.com, une mine d’informations sur la musique en général, avec des critiques pointues d’albums de rap, essentiellement du rap américain. Donc ce site était peu connu en Europe.
Je souhaitais m’en inspirer… sans copier. Pourtant à l’époque je n’avais aucunes connaissances en programmation web…
Un premier nom émerge enfin pour mon projet vers 2006/2007 : Treeptik. Pas mal, mais le rapport avec le rap n’est pas assez voyant. Quelques anées plus tard, en 2009, la révélation vient enfin : AlloCiné me subjugue, car à cette époque, le téléchargement de films en masse sur mon disque dur me procure la nécessité de beaucoup m’informer, pour me forger une petite culture cinématographique. Le 7ème art avait sa méta-base de donnée. Pourquoi le rap n’aurait-il pas le même genre d’outil ? Voilà d’où vient l’idée de départ d’Allo Rap.
Seulement voilà, sans les mêmes moyens financiers et humains de ce genre de mastodonte, quel pourra être sa forme, son but, si c’est un site « du pauvre » ? Aucune idée à ce stade. J’ai juste un premier logo :
Mais un homme va changer tout cela : Monsieur Eric Dupin, auteur du fameux blog de tech – le premier en France d’ailleurs à cette époque – Presse-Citron.net, lancé depuis 2005 déjà. Sa qualité d’écriture et son authenticité représentent un modèle à suivre d’emblée pour moi. Et je m’aperçois qu’un bon blog n’a besoin que d’un seul employé : moi-même. Voilà pourquoi Allo Rap est un blog dans sa forme.
Mais une fois celui-ci en place en 2011, la technique est fonctionnelle mais rudimentaire, la ligne éditoriale mince comme peau de zob, et la charte graphique bien crados :
La galère débute donc et s’installe pour de nombreuses années. Je me sens seul devant l’océan que représente ce foutu Internet. Alors mes articles ne font pas le buzz, je tâtonne, fais ce que je peux quand je le peux, en dehors du taffe. Assez peu de commentaires pour m’encourager, mais un rappeur de l’underground dijonnais fut d’accord pour s’entretenir avec moi. J’essaie bien d’interviewer des rappeurs de plus gros calibre, beaucoup refusent comme Orelsan, qui pourtant se produit dans une petite ville de province, pas loin de chez mes parents. Je suis rien, ni personne… [ Musique de violons ]. Mais heureusement, des rappeurs respectés dans le milieu du boom bap français comme G-Zon répondent à mes appels à l’aide et me donne de la force pour continuer.
D’années en années, les idées émergent dans la douleur, la pratique de l’amélioration continue chère à l’industrie japonaise me permet de détecter des besoins du public qui ne sont pourvus par aucun site web : pack de mixtapes/street-tapes/freestyles/clips, méta-articles etc. à la limite de légalité, certes, mais c’est l’essence du Hip-hop que de faire bouger les frontières.
Alors aujourd’hui, vous seriez tenté de dire bravo Mister R, tu as réussi à mettre en place un vrai outil, qui commencent à générer pas mal de vues et de téléchargements.
Oui.
Maintenant je dois répondre à la plus importante des questions, pourquoi ?
Pour quelle raison j’existe ? La même question trouve facilement sa réponse pour des fans de la marque Harley Davidson, prêts à se faire tatouer le logo sur leur peau. Mais que les internautes devront retenir d’AlloRap ?
C’est donc la raison de cet article, me permettre d’aller au-delà de ma passion et comprendre comment redonner de l’énergie à l’univers du bon rap underground.
Au fait, j’ai rencontré Public Enemy à la fin des années 80, quand j’étais au plus mal dans ma peau. En rupture avec mon père, exigeant avec moi alors que je passait mon temps à rêver, les profs, sans autorité ni charisme, et mon quartier HLM, trop nerveux pour ne pas m’émousser, ce genre musical est devenu au fil du temps mon seul ami fiable, mais aussi un support de gamberge.
Au fond, comment définir le rap selon mes critères, avec le recul de toutes ces années de bons et loyaux services ?
C’est l’infini. Rien que cela. Et je préfère m’en tenir à cette définition plutôt que de rentrer dans des explications plus longues, car cette discipline artistique a tellement de facettes… Cependant il y a une qui selon moi mérite que l’on s’y attarde vraiment, c’est la dimension politico/philosophique. Il faut dire qu’après PE, c’est NTM qui m’a mis le démon quand j’étais en 3ième…
Bref, on vit dans un monde où on essaye de vous convaincre sans cesse de beaucoup trop de choses : les publicités de vous faire acheter, les média que le monde va de pire en pire, les scientifiques qu’on peut le sauver, les politiciens qu’il faut voter pour eux, votre égo qu’il vous faut une belle berline allemande, et vos hormones que vous devez fusionner (temporairement) avec une femme pour perpétrer la race humaine… Et la liste est plus longue que le casier judiciaire de Balkany.
La culture et les arts, cependant, ont toujours permis de s’affranchir un peu de cette pression, mais le rap, c’est sa première raison d’être si on veut, et d’ailleurs quand il est né aux États-Unis, c’était vital pour le jeune noir américain de pouvoir s’émanciper mentalement de la pauvreté, car elle n’avait qu’un souhait pour lui : qu’il finisse mal.
Mais aujourd’hui, malgré la perversion régnant tout autour de ce mouvement musical en France, le rap dans sa forme brute est toujours aussi vital pour beaucoup de personnes dans la rue, à commencer pour moi. Bien sur je veux en vivre, car vivre de sa passion, ce n’est plus jamais à avoir à travailler de sa vie, comme le veut l’adage. Mais j’en suis loin aujourd’hui.
J’ai aussi grandement besoin de découvrir sans cesse des nouveaux artistes et des nouveaux projets qui poussent ma réflexion et suscitent mon émerveillement. Je dois simplement déterminer comment je peux aider cette culture en retour, voilà tout.
Car pour moi elle permet aux jeunes d’hier, d’aujourd’hui et de demain de prendre du recul et de pouvoir se forger une opinion du monde qui n’est pas celle que l’environnement essaye de leur inculquer. Vous allez me répondre t’es gentil monsieur le grand idéaliste, mais avec des rappeurs « bling bling chicha scooter vocoder spatial » comme JuL ou bien Maître Gims, du rap pour les salles d’attentes de maison de retraite et les soirées clips sur W9, le niveau culturo/intellectuel de nos jeunes est mal barré…
C’est justement l’ADN d’AlloRap, d’attirer ces jeunes perdus vers la lumière du rap conscient… Mais où se cache t-il à notre époque Instagrammante ce rap qui élève un peu le niveau ? Et bien je vais vous répondre les pottos, mais avant cela, laissez moi vous parler de ma petite enfance (c’était pas la petite maison dans la prairie lol).
J’étais une tête à claque, c’est clair, je n’avais ni QI élevé, ni culture, ni savoir, ni compétences particulières. Mais heureusement, j’avais le groupe Assassin sur une cassette. Quand j’y pense aujourd’hui, les frissons parcourent ma carcasse et je me rend compte que les lyrics du rappeur principal de ce groupe, Rockin’ Squat, constituaient pour moi l’équivalent d’une ceinture de sécurité pour une voiture 2.0, une ceinture qui empêche de se conduire mal quand t’es un jeune con élevé au club Dorothée.
Vous allez répondre avec stupéfaction que ça y est, on m’a perdu, j’ai vrillé complétement, pi’ qui c’est ce groupe, Assassin, capable d’éduquer les foules ? Et en plus, pas tant connu que Solaar ou IAM ! Je pourrais vous faire 3 pages sur eux et vous saouler comme mon prof d’histoire géo avec la seconde guerre mondiale. Nan, au lieu de cela, vous allez juger par vous même de l’importance intrinsèque, intemporelle et sociale de ce groupe de rap, par une simple chanson qu’ils ont sorti en 1993, avec un clip vidéo en plus, qui s’intitule « L’Ecologie : Sauvons la Planète ! » :
Alors on fait moins les malins, les jeunes nés après l’an 2000 ? Trêve de plaisanterie, même si Rockin’ Squat (au passage c’est le frère de Vincent Cassel, ça fera un mot clé en plus pour mon article…) n’a jamais cessé de se remettre en question, par exemple en cachant systématiquement son visage à la caméra à l’aide d’un masque pendant plus d’une décennie, et de pondre des albums toujours plus salvateurs pour nos âmes d’occidentaux – je vous laisse martyriser le moteur de recherche de Youtube pour vous en convaincre – j’ai longtemps cherché l’héritier de cet artiste, comme aujourd’hui les cinéphiles recherchent qui sera le prochain Spielberg, alors que le bougre est toujours en vie. Ce genre de tâche n’est pas aisé vu la légende vous en conviendrez, mais pour moi c’est chose faite et j’en suis très content.
J’ai donc trouvé un des héritiers du rap contestataire tel qu’on l’appréciait jadis, mais ce qui est vraiment cool, c’est que ce n’est pas une pâle copie comme J.J. Abrahams en ersatz de Spielberg, un mec qui reprendrait les codes du genre, sans rien n’y apporter de nouveau.
Typiquement, il y a bien une chose concrète qui distingue justement les deux artistes, c’est qu’à l’époque du premier, il y avait encore un espoir de sauver notre écosystème.
Bref, je ne vais pas vous faire languir plus longtemps, ce bougre d’agitateur de cervelle, c’est le rappeur Chronic, et comme Rockin’, il est cultivé mesdames et messieurs :
Mais complètement désabusé mesdames et messieurs. Cela donne un cocktail d’une rare intensité, surtout qu’il a son propre style de débit de mot, unique et inimitable. Et l’écriture est novatrice, car elle s’approche du saint Graal que j’ai toujours poursuivi : comment divertir l’oreille tout en nourrissant le cortex, du moins en améliorant sa focalisation sur un monde très complexe et aliénant. Les instrus quand à elle sont toujours assez travaillées, et portent en elles sentiments et messages, mêmes si on enlève les paroles.
Par contre, niveau optimisme, je vous le redis, aujourd’hui ce n’est plus les mêmes paramètres qu’avant le changement de millénaire. Comment expliquer l’ambiance des albums de Chronic… Vous savez, quand vous venez de vous faire plaquer par votre femme, vous écoutez du Daniel Guichard les lumières éteintes…
Et bien moi, quand j’apprends que l’espèce humaine est très probablement condamnée par un aspect de son économie carrément passé sous silence par les média, à savoir ce monstre qu’est la croissance infinie (nécessaire pour alimenter le capitalisme), qui épuise nos ressources comme une sangsue sur la peau d’un anorexique… je regarde un petit clip de Chronic, mais je préfère vous conseiller de laisser les lumières allumées :
D’ailleurs j’ai déjà fait un billet sur Chronic qu’il a gentiment commenté, sur l’époque où il faisait parti du groupe nommé astucieusement 1984, et Dieu que cette époque me manque, car les deux albums de ce collectif sont très originaux et ultra efficaces, pour à la fois élever sa conscience sur tellement de choses, à l’aide de tellement de références à la littérature comme Le Meilleurs des mondes d’Aldous Huxley… et aussi décrypter la soit disant démocratie moderne des pays comme le notre, mais en même temps, faire comprendre de la chance que nous avons de ne pas vivre à l’autre bout du spectre, comme par exemple en Corée du nord, le Big Brother incarné… Et oui, tout est relatif ! La liberté que j’ai d’écrire sur mon blog n’a pas de prix, j’en ai conscience mais cela dit, faisons tout pour que cela dure…
Donc pourquoi AlloRap ? Parce que Chronic. Mais pas que…
Vous allez bientôt comprendre qu’AlloRap est en fait une arnaque Diabolique, car mon référencement Google est assuré par des articles sur des rappeurs connus, bien en place, comme Damso ou Niska. Mon projet de vie, c’est de faire profiter de cette notoriété factice à des artistes authentiques comme Chronic, qui d’ailleurs vient de lâcher encore un album… gratuitement (vous pouvez payer ce que vous voulez comme somme d’argent cependant alors go).
Quand on vous offre de vous émanciper cérébralement d’un monde qui nous endette dès notre arrivée sur terre, je me devais, de mon côté, de vous en informer, car c’est naturellement une bonne affaire 😉
Mais je souhaite aller plus loin dans ma démarche de détournement de notoriété, et m’engage solennellement : si AlloRap génére des profits cette année, je reverserais une partie de cet argent sur le compte Teepee de Chronic. Je serais alors son sponsor non-officiel. Internet is magic !
D’abord cette bonne action sera égoïste, ne soyez pas naîf, car je souhaiterais pouvoir écouter des journées entières ses palabres, qu’il continue de constituer la bande son de cette fin du monde en marche, mais surtout AlloRap doit supporter un artiste qui symbolise à lui seul la raison d’être d’AlloRap. La boucle est bouclée.
Par la même occasion, faire honneur à la mémoire de nos parents, des groupes de rap comme Assassin, oubliés par les grands média pendant les années 90, car dénonçant les grands média, mais qui a élevé la conscience de nombreux jeunes, à voir tous les commentaires dans les réseaux sociaux par les concernés, aujourd’hui quarantenaires et nostalgiques. Ils ont quand même osé pondre OKLM en 1991 le premier clip de rap contestataire contre la bonne société française :
Chronic, soldat de l’apocalypse, m’insuffle finalement quel va être mon prochain subterfuge crapuleux mais pas forcément amoral sur AlloRap, gratuit à réaliser, pour faire un pied de nez à l’industrie musicale, aujourd’hui focalisée par le nombre de vue et de stream. Car pour moi la Joconde resterait la Joconde même dans un grenier à l’abri des regards. Je souhaiterais ainsi, même si cela peut paraître trop ambitieux, devenir un correcteur de la corruption de la notoriété engendrée par la différence de moyens entre la Ligue 1 et la dernière division. Celle qui est consciente de notre destin en marche.
Alors maintenant, dans les dossiers ZIP de mixtapes ou de pack de téléchargement de freestyle de rappeurs comme La Fouine ou Booba, il y aura un projet d’un artiste dit « underground », ou du moins, un artiste « utile ». Bref, projeter et mettre en avant par ce biais les bons artisans, amoureux du bon son boom bap à l’ancienne, et souhaitant changer le monde plus que leur porte-monnaie, mais qui ont besoin d’aide face à l’ogre capitaliste, qui, il faut bien l’admettre, nous offre à tous une raison d’être dans l’activité de le combattre !
Ainsi, pour inaugurer ce concept bio-éthique, le pack freetyle du rappeur Hamza contiendra le dernier album de Chronic, dans un dossier nommé « BonusDécouverte ».
La fin justifie le malin.
Bonne année 2020.
C’est presque un début de livre que tu pourrais appeler mon histoire du rap.
Bravo en tout cas j’espère que tu auras beaucoup de vues . C’est bien d’avoir inserré des clips chose qu’on ne peux faire dans un livre classique