Je me suis intéressé il y a quelques temps à 50 Cent sous l’angle du business. Il a écrit un livre là dessus… Mais j’avais pas été plus loin que ça dans ma réflexion sur les business plan hip-hop. Après tout, le rap game est « un sport de sang », dans lequel « t’es en chien si tu sors du ring » (une rime signée Arsenik), et quand je voit Jay-Z et Kanye West être à la tête d’une fortune respective de 450 millions de dollars et de 100 millions de dollars, je ne suis guère surpris que les entrepreneurs s’inspirent du rap…
Je suis moi-même sans cesse à la recherche de la meilleure manière de fabriquer du cash, et je suis loin d’être un boss. Je lis souvent des journaux économiques, je n’y comprend pas toujours grand chose mais un article des Echos à titillé mon âme de b-boy de la première heure, auhourd’hui assoiffé de caillasse. On y relate la mauvaise habitude de certains PDG à faire des analogies entre le management d’un côté et de l’autre le judo, le golf, la mafia et… le rap.
Je m’étais toujours dis dans mon for intérieur que les « gens de la haute » devraient eux aussi écouter du rap, pour garder la gnac, s’inspirer de ces histoires narées par des poètes comme Oxmo Puccino ou… Booba. Seulement voilà, cet article est une critique de ce genre d’analogie. Malgré cela je me suis intéressé à ce mec cité dans cet article, qui a fait du blé et qui aime le rap : Ben Horowitz. Il est né en 1966 à Londres, mais grandi à Berkeley (Californie). C’est un entrepreneur de la « high technology », co-fondateur avec Marc Andreessen (co-fondateur de Netscape…) de la firme d’investissement Andreessen Horowitz, et de l’entreprise de développement logiciel Opsware, que Hewlett-Packard acquis pour 1,6 milliard de dollars au comptant en juillet 2007 ! Bref.
A première vue, aucun rapport entre le rap et ce gentil créateur de start-up (à gauche sur la photo ci-dessus). Pourtant ce dernier a investi 15 millions de dollars dans le site Rapgenius, et au quotidien il essaie d’être original sur son blog bhorowitz.com dans sa vision des principes du business en utilisant des paroles de rap. Ses convictions l’ont amené à parler devant le Congressional Black Caucus au sujet du rôle que les afros-américains jouent dans la technologie et les réseaux sociaux.
Par ailleurs, il expliqua au New York Times que les livres sur le business enseignent les mécaniques, mais ne peuvent pas enseigner la passion ou le feeling. Il dit que le rap « l’aide à se connecter émotionnellement ». J’ai voulu aller plus loin et donc voici une analyse des références hip-hop issues de son blog :
Rakim, Follow The Leader
Lyrics: « You’re just a rent-a-rapper, your rhymes are minute-maid/ I’ll be here when it fade to watch you flip like a renegade »
Marc Andreessen et Ben Horowitz pensent que la meilleure personne pour diriger une entreprise dans les nouvelles technologies est son fondateur…
Kanye West, Good Morning
Lyrics: « I mean damn, did you even see the test/ You got D’s, motherf*$@%&, D’s! Rosie Perez »
Cette punchline mémorable de Kanye semble un choix byzarre pour un article titré « Comment Andreessen et Horowitz évaluent les CEOs (un chef de direction en bon français, le plus haut gradé d’une hiérarchie d’entreprise) ». Mais quand on lit comment Horowitz fait passer un test en 3 questions à des CEOs de sociétés dans lesquelles ils souhaiteraient investir, ça commence à me parler.
Nas, Hip Hop is Dead
Lyrics: « You can’t blame Jazz Musicians/ or David Stern with his NBA fashion issues »
Sur le titre éponyme de son huitième album, Nas raconte à l’auditeur que lorsqu’il voit des problèmes arriver dans le rap game, le doigt devrait être pointé vers le rap lui-même : si David Stern a banni les accessoires hip-hop (chaines en or etc.) de la NBA, le hip-hop doit se poser des questions sur sa responsabilité. Horowitz pense que lorsque des soucis arrivent dans une boîte, c’est le CEO qui doit être blamé.
Bushwick Bill, Fuck a War
Lyrics: « You’re lucky that I ain’t the president/ Cause I’ll push the f*#king button and get it over with/ F&$k all that waiting and procrastinating/ And all that goddamn negotiating »
C’est déjà balaise de citer Bushwick Bill. Mais quand quelqu’un peut utiliser cette référence rapologique pour expliquer la différence entre un chef qui est seulement bon au front et un chef qui est bon à faire aboutir les choses derrière la scène quand tout n’est pas rose, c’est juste géniallissime.
Dorrough, Old School Nikes
Lyrics: « Brand new kicks diet/ I want everyone to try it/ I only got one motto/ If the shoe fits buy it »
Quand il parle de l’invistessement de sa firme dans ShoeDazzle, Horowitz aurait pu utiliser des centaines de chansons différentes qui parle de basket. Au lieu de ça, il a choisi un single de Dorrouh. Cool.
Lil Wayne, Swag Surfin
Lyrics: « Lost some real n%^$as I knew from a long time ago/ But Heaven or Hell, I’m hoping that they be where I’m a go »
A première vue, ce lyric de Lil Wayne chanté sur la mixtape No Ceillings, ne semble pas coller avec cet article d’Horowitz sur le manque d’évolution des navigateurs web. Mais le dernier paragraphe évoque l’un de ses chefs chez Mozilla, Mike Homer, qui a réchapé à la maladie de la vache folle. Ensuite on comprend mieux.
Ice Cube, Go to Church
Lyrics: « If you a scared motherf%^*&r, go to church »
« Dans mon expérience de CEO, j’ai trouvé que les plus importantes décisions ont testé mon courage beaucoup plus que mon intelligence » dit Horowitz dans un article.
Dr. Dre, The Watcher
Lyrics: « N*&$!s get capped up and wrapped in plastic zipped up in bags when it happens, that’s it. »
On n’est pas très sur du rapport entre cette rime de Dre et le fait de renvoyer un CEO, mais c’est une sacré punchline !
Outkast, Church
Lyrics: « Man, have you ever really wondered/ Like why are we here? What the meaning of all this? »
Fin 2012, Horowitz prit du temps pour expliquer aux gens pourquoi lui et Marc Andreessen ont fondé leur firme d’investissement. Faire du sens en utilisant cette ligne d’Outkast oblige les gens à prendre un moment pour réflechir sur leur but dans la vie.
Drake, Right Above It
Lyrics: « We walk the same path, but got on different shoes/ Live in the same building, but we got different views »
Juste penser que vous pouvez faire le taf de quelqu’un d’autre ne veut pas dire que vous le pouvez. Habiter dans le même immeuble de quelqu’un, ne veut pas dire comme le pense Drake que vous allez avoir les mêmes vues. Dans un article, Horowitz évoque le principe de faire échanger leur place entre le service des ventes et le service de support aux utilisateurs, deux services qui se chamaillent, pour leur montrer la difficulté de la tâche de l’autre service au jour le jour.
Heavy D, We Got Our Own Thang
Lyrics: « Understand this before you make a comment/ Because there’s always a meaning in a Heavy D statement/ In this life I strive for improvement/ Be your own guide follow your own movement »
Personne ne va croire en vous et votre rêve plus que vous-même. Attendre des autres qu’ils valident vos envies et vos besoins est ridicule. Utilisant l’exemple de Jim Gilliam qui a réchappé à un cancer, quelqu’un qui créa un buzz destabilisant en disant: « C’est un cliché, mais dire : ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort, est vrai ». Horowitz donne clairement l’idée que si vous voulez faire quelque chose, vous devez aller au bout, comme Heavy D le proclame : « Soyez votre propre guide suivez votre propre mouvement ».
Ma$e, Lookin’ At Me
Lyrics: « Now what the hell is you lookin’ for?/ Can’t a young man get money anymore?/ Let my pants sag down to the floor/ Really do it matter as long as I score? »
Quand la start-up de Kevin Systrom, Instagram, recherchait des fonds, Andreessen Horowitz investit 250 000 $. Une somme assez rondelette pour une société dirigée par un CEO qui n’a pas encore fait ses preuves. Et bien ils ont gagnés beaucoup quand Facebook racheta cette société pour 1 milliard de dollars : 78 000 000 millions empochés par leur firme d’investissement. Cependant, beaucoup de gens posèrent la question à voix haute pourquoi les deux n’ont pas investi plus dans Instagram. Réfléchir et comprendre la situation est toujours facile après coup, mais Ben veut juste savoir « Est-ce que c’est vraiment important du moment que j’ai marqué le but ? ».
Jay-Z, A Week Ago
Lyrics: « It was cool when you had hell of weed to smoke/ And you bought a new home where you could keep your folks/ I don’t see how this side of you could be provoked/ It was all good just a week ago. »
On a tous eu des situations où on stoppe une minute en réflechissant comment une amitié avec un ami très proche a pu se dégrader. Il semble, comme Jay-Z le dit, que c’est comme si tout était encore bon seulement la semaine d’avant. Cette sensation doit être encore plus douloureuse quand vous devez licensier un ami d’une société pour laquelle il a sué. Dans un article, Horowitz explique comment laisser partir un employé qui est un ami proche de vous.
The Game, Don’t Need Your Love
Lyrics: « First they hate you, then they love you, then they hate you again/ What the f*ck do it take for a gangsta to win? »
Même si The Game a probablement repris ces lyrics de « Meet the Parents » de Jay-z, ils peuvent toujours s’appliquer à l’article de Horowitz sur le fait d’embaucher des employés avec un Masters in Business Administration. Avec le consensus général qu’il ne faut pas embaucher des personnes avec un MBA parceque leur formation les empêchent de s’adapter aux start-ups, Ben dit qu’il serait peut-être temps de les aimer.
Lupe Fiasco, Beautiful Lasers
Lyrics: « Don’t admit that your faith is weak/ Don’t say that you feel like dying/ Life’s hard then it feels like diamonds/ Your home’s just far too gone/ Much too late to even feel like trying/ Can’t understand what I’m saying/ Can’t figure out what I’m implying/ If you feel you don’t wanna be alive/ You feel just how I am »
Fréquenter longtemps Twitter et vous aller vous s’apercevoir que le terme « struggle » (« épreuve ») a commencé de faire son chemin. Mais dans le milieu des start-ups, Ben Horowitz a quelques idées à propos de se que « the struggle » implique quand « des gens vous demande pourquoi vous n’abandonnez pas et que vous ne savez pas la réponse ». Pour ceux qui sont en train de passer une épreuve (« struggle »), il écrit une liste de paroles du rappeur de Chi-Town, Lupe Fiasco, pour rappeler aux gens qu’ils ne doivent pas perdre la foie même s’ils sentent le mur se rapprocher.
Dr. Dre, Let Me Ride
Lyrics: « It’s just another mutherf*ckin’ day for Dre, so I begin like this/ No medallions, dreadlocks, or black fists/ Just that gangsta glare with the gangsta raps »
Un bon jour pour Dr Dre est juste un jour à faire le gangsta. Pour Horowitz, un bon jour est un jour où les employés font ceux pour quoi ils sont embauchés, faisant de la boîte un meilleur endroit pour tout le monde.
Public Enemy, Fight The Power
Lyrics: « It’s a start, a work of art/ To revolutionize make a change nothing’s strange/ People, people we are the same/ No we’re not the same/ Cause we don’t know the game/ What we need is awareness, we can’t get careless/ You say what is this? »
Quand Ben arrête de bloguer, le rap ne s’arrête pas. Loin de là. Quand Christian Gheorghe, fondateur et CEO d’une société spécialisée dans l’ «analytics », Tidemark, écrit un article en tant qu’invité sur le blog de Ben au sujet des révolutions dans certains secteurs technologiques, et il cite l’ultra classique « Fight the Power » un tube d’un des meilleurs groupe de rap de tous les temps, Public Enemy.
Rick Ross, Sixteen
Lyrics: « It’s funny because it’s been on my mind lately/ Having a dope beat, dope idea…/Sixteen bars ain’t enough!/ How the f*ck can I squeeze my whole life into a 16 bar verse? »
Dans cette intro de la chanson, Rick Ross explique qu’il a trop à dire pour que ça tienne dans un couplet. Horowitz veut mettre en avant l’importance des meetings en tête à tête au travail. Vous avez quelque chose de trop long à dire à un employé dans une réunion ? Faites le à part.
Kanye West, New God Flow
Lyrics: « Aww man, you sold your soul/ Naww man, mad people was frontin’/ Aww man, made something from nothing »
A chaque fois qu’une compagnie procède à des changements profonds dans son management, les gens se pleignent que soit ils font fausse route soit encore pire, ils perdent leur âme. Dans un article titré « Old People », Horowitz explore les avantages et inconvénients des nouvelles start-ups, souvent crées par des fondateurs qui ont sués sang et eaux pour qu’elle fonctionne, embauchant des managers senior pour aider à faire touner la boîte. L’avantage ? « Embaucher quelqu’un qui a déjà réussi ce que vous essayer de faire peut radicalement augmenter la vitesse pour atteindre le succès ». Mais attention : « Si un senior est embauché et que l’entreprise est incapable d’acquérir le savoir et l’expérience dans une branche spécifique », tout peut tomber à plat.
Jay-Z, Izzo (H.O.V.A.)
Lyrics: « I do this for my culture/ To let them know what a n@#!a look like when a ni&%!a in a Roadster/ Show them how to move in a room full of vultures/ Industry is shady, it needs to be taken over/ Label owners hate me, I’m raising the status quo up/ I’m overcharging n$%^a for what they did to the Cold Crush »
C’est un morceau mémorable de Jay-Z, produit par Kanye West sur l’album « Blueprint », qui parle de la culture hip-hop de plus en plus large. Horowitz utilisa ce chapelet de rimes pour parler de l’importance de la culture pour une entreprise. Après avoir éliminé ce qui ne peut pas faire l’objet d’une bonne culture, il donne de bons exemples ainsi : « Je décris le travail d’un CEO comme savoir quoi faire et savoir ce que l’entreprise doit faire pour faire ce que vous voulez ». Ou bien : « Mettre au point une culture d’entreprise spécifique va vous aider à obtenir de votre entreprise qu’elle fasse ce que vous souhaitez dans certains aspects important pour un très long moment ». Je pense que Jay-Z serait d’accord.